La navigation du pigeon voyageur. (2)
En poussant mes investigations plus avant, je suis tombé sur un autre « pape » de la recherche en matière de navigation chez le pigeon voyageur, H.G. Wallraff (Institut Max-Planck, Seewisen, Allemagne). Dans son article, il n’a guère consacré de place à la théorie magnétique. Dans son rapport (dans « Navigation ») de 7 pages, c’est à peine s’il y consacre une petite ligne. Et cela donne: « les manipu-lations de nature magnétique n’ont jamais empêché les pigeons de rentrer au colombier ». Son article ne se rapporte pas à de nouvelles expérimentations mais constitue une réflexion où 7 thèmes sont abordés. Ces 7 pistes permettent de saisir la tendance actuelle et ceci aussi bien pour la théorie visuelle qu’olfactive. Comme il ne s’agit pas ici de donner le rapport en détail, je me limiterai à quelques points. A partir de tout ce qui a été publié, Wallraff est capable de s’imaginer que le monde extérieur est empli de substances odorantes que le pigeon peut utiliser, afin de retrouver le chemin de la maison à partir d’un point inconnu. Selon lui, les connaissances nécessaires pour une utilisation rationnelle de ce
type d’informations à partir de la composition de l’air, doivent être acquises et renforcées à la maison, sur le colombier, en associant des signaux olfactifs avec la direction du vent. Wallraff est conscient qu’il subsiste un nombre élevé de points critiques qui empêchent tout le monde d’être convaincus par cette théorie. Il admet que la précision obtenue quant à la direction à suivre n’est certaine-ment pas très grande et que de plus les résultats sont différents suivant la place et l’époque du lâcher. Néanmoins, il ajoute que c’est par manque de connaissances que nous ne connaissons pas encore les substances odorantes de l’atmosphère qui seraient impliquées dans ce phénomène. Il conclut en affirmant que pour le moment, la navigation olfactive des pigeons reste non seulement mystérieuse mais apparemment impossible à se représenter. Il ajoute cependant que les données expérimentales montrent l’existence d’une navigation olfactive, de sorte que c’est utile de continuer à chercher dans cette direction. K.P. Able (dans « Navigation », 1996), qui n’a pas personnellement fait de recherches sur la question, fut invité par l’éditeur, à donner son avis en tant qu’observateur neutre. S’il se range à l’opinion de Wallraff, il émet cependant des réserves quant à l’exclusivité de la navigation olfactive. R. Wiltschko est le dernier auteur à livrer son opinion sur la navigation olfactive des pigeons voyageurs.
Elle ne peut pas accepter comme démonstration incontestable de cette théorie des expériences comme les siennes, ce qui signifie que d’autres voies ne doivent pas être exclues. Le rapport de Wallraff comporte encore quelques points intéressants :
1) Dans un article de P.R. (8/94), j’avais déjà attiré l’attention sur le rôle et l’importance de la reconnaissance des caractéristiques familières et visibles du paysage.
Au cours des années, l’opinion générale a changé plusieurs fois. En 1994 j’ai déclaré: en 1992, Wallraff et Streng avaient de nouveau une vision positive. Lorsqu’un pigeon approche de son pigeonnier et survole des régions de plus en plus familières, les repères topographiques vont commencer à jouer un rôle de plus en plus important dans la localisation du colombier. Ces auteurs pensaient même que les pigeons ayant eu la chance de reconnaître le paysage à un endroit familier, ne fût-ce que pendant 5 minutes avant le lâcher, voleraient plus rapidement vers leur colombier. Cela correspond à ce que les colombophiles savent depuis longtemps : les pigeons rentrant à la maison augmentent leur cadence lorsqu’ils arrivent au-dessus d’une région familière. C’est l’effet de la reconnaissance locale, une caractéristique principalement acquise lors des premières sorties et des vols d’entraînements des jeunes pigeons. Combien de fois n’ai-je pas insisté sur la nécessité que cette reconnaissance locale ait lieu le plus rapidement possible. C’est-à-dire que les pigeonneaux doivent prendre connaissance le plus vite possible des environs: voir l’extérieur, sortir, grimper sur le toit, effectuer des tours de plus en plus lointains. Cela donne vraisemblablement un sentiment de sécurité aux animaux. Je dois dire que je pensais en parlant de reconnaissance locale, uniquement aux repères visuels. Par contre, d’après son texte, je peux affirmer qu’ici Wallraff pense également à l’usage d’un deuxième sens, l’odorat.
2) Wallraff a émis une nouvelle idée en rapport avec la technique suivie jusqu’à présent lors de la recherche sur la navigation du pigeon voyageur. Celle-ci consiste dans l’observation au moyen d’une longue-vue de la direction prise après le lâcher, donc de l’endroit de l’horizon où le pigeon disparaît.
Wallraff présume que cette manière de faire est fautive. Puisqu’une partie des pigeons, qui prennent une mauvaise direction au départ, reviennent quand même à la maison. Selon lui, il faut prendre en considération non seulement le retour au colombier mais également calculer la vitesse de retour après un lâcher à partir d’un point inconnu. Ce changement dans la technique appliquée à la recherche sur la navigation du pigeon voyageur me réjouit et va au devant d’une remarque que j’avais déjà émise plus d’une fois. Ainsi, je m’étais déjà soucié (P.R. 9/94) des grandes pertes et des retours souvent laborieux des pigeons d’expérience par rapport aux prestations en concours de nos pigeons voyageurs. Je n’arrive pas à me défaire de l’idée que dans les essais scientifiques, on utilise des oiseaux tout-venants et atteints de maladies chroniques. En conclusion, on peut se réjouir que, grâce à la nouvelle technique proposée par Wallraff, de nouveaux aspects dans la recherche vont être mis en évidence. Il faut cependant être conscients qu’il reste encore beaucoup de pain sur la planche.
Prof. G. Van Grembergen
Notices:
- D’après Wallraff et Streng, les pigeons qui ont la chance de reconnaître le paysage à un endroit familier, ne fût-ce que pendant cinq minutes avant le lâcher, rentrent plus rapidement.
- Lorsqu’un pigeon s’approche de son pigeonnier et survole des régions de plus en plus familières, les repères topographiques commencent à jouer un rôle de plus en plus prépondérant dans la localisation du colombier.
[ Source: Article édité par Prof. Dr. G. Van Grembergen – Revue PIGEON RIT ]
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