6 novembre 2021 Par admin

Le foie et les reins de pigeons

Ces 2 organes représentent chez le pigeon voyageur deux éléments essentiels de la bonne condition athlétique, nous allons le voir. Le foie est un organe volumineux, d’un brun rougeâtre, de forme particulière que chacun connaît. Chez le pigeon, il n’y a pas de vésicule biliaire, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas sécrétion de bile, au contraire. La bile est un liquide jaune verdâtre devenant vert foncé à l’air et à la lumière, assez épais, extrêmement amer. Elle a de multiples propriétés: elle est antiseptique de l’intestin y limitant les fermentations. Elle émulsionne les graisses, c’est-à-dire qu’elle “casse” les grosses molécules des graisses en de beaucoup plus petites qui pourront traverser la paroi intestinale et être assimilées. Certaines maladies (trichomonose, vers capillaires, paratyphose) augmentent la production de bile: les fientes deviennent alors d’un vert intense, foncé, qui oriente le diagnostic. Le jeûne en l’absence d’appétit fait que la fiente n’est plus composée que de mucosités intestinales et de bile. Elle est alors rare, petite, vert-noir, collante. Le foie a aussi une fonction antitoxique. Sa disposition anatomique fait que le sang qui vient de s’enrichir des produits de la digestion pénétré tout de suite après dans le foie. En cas d’intoxication d’origine intestinale, si l’intestin n’a pu résister au poison (il se congestionne, souvent se contracte plus vite, etc…), ce sang, porteur de poison va pénétrer dans le foie dont les cellules se trouvent alors “en première ligne”. Les processus de détoxication sont fort complexes et fort variables selon le poison en cause, qui peut être organique, ou même un produit de l’organisme du pigeon lui-même (on parle alors d’auto-intoxication) ou minéral (engrais par exemple). Les cellules hépatiques (du foie) sont évidemment très exposées dans cette bataille, et beaucoup d’entre elles vont en mourir. Quelquefois même toutes ou presque et le pigeon va mourir. Mais le foie a une grande capacité de renouvellement de ses cellules et au bout de quelques semaines, si l’attaque n’a pas été trop violente, l’organe sera reconstitué.
Si le foie n’a pas réussi la détoxication convenable, les filtres de l’organisme qui sont les reins, vont être atteints à leur tour. Ce sera la néphrite. Nous verrons cela tout à l’heure, et revenons aux fonctions du foie.

Le foie a aussi une fonction antianémique. Cela grâce à deux fonctions. La première est la fonction “martiale” d’assimilation du fer dont on sait la nécessité pour la formation de l’hémoglobine des globules rouges du sang. La seconde est la synthèse par le foie de la vitamine B12, facteur antianémique. Toutes les graves atteintes hépatiques quelle qu’en soit la cause initiale (maladie, intoxication, etc…) provoquent secondairement l’anémie: oeil se décolorant, bouche blanche, tristesse, amaigrissement, quelquefois fientes “blanches” par blocage biliaire.
Le foie est aussi l’organe qui a le pouvoir de désamination.
Expliquons-nous. Au cours du vol de retour, ou de jeûne prolongé, lorsque les réserves de glycogène (forme de stockage du glucose par le foie: c’est sa fonction glycogénique) sont épuisées, le foie permet à l’organisme de “faire du glucose” depuis les protéines des muscles. On dit que “le pigeon brûle ses muscles”.
Le foie casse donc les protéines en glucose et urée (en acide unique puis urates), ce deuxième produit étant un déchet éliminé par le rein.
Par cette énumération, on voit combien l’intégrité du foie est essentielle chez le pigeon de sport. On peut dire que toute atteinte hépatique profonde élimine automatiquement le bon pigeon sur le plan sportif. En effet, athlétiquement, le foie est le buffet des réserves du glycogène, combustible direct de l’effort musculaire. Si le foie n’a plus que des capacités réduites, l’effort possible sera également réduit.
Ajoutons le stockage des vitamines A, D, groupe B, la synthèse de la vitamine B12 et l’on comprendra…
Les reins sont deux masses rougeâtres à chacun 3 lobes encastrés dans 3 alvéoles osseuses du dos. Les reins sont donc suspendus au-dessus de la masse des viscères de l’abdomen. Juste en avant d’eux et légèrement plus bas, il y a les glandes de la reproduction (ovaire ou testicules).

Les reins sont les filtres du sang. Ils en éliminent les déchets définitifs du fonctionnement de l’organisme (eau, urates, protéines, hormones, minéraux), mais aussi les microbes et toxiques éventuels. Cela ne va pas sans risques. Le travail musculaire intense augmente évidemment la quantité des déchets à éliminer. C’est pourquoi tant de bons pigeons “périssent par les reins”. Le sacrifice et l’autopsie d’anciens bons pigeons qui se sont révélés de piètres reproducteurs, donc ayant ‘perdu tout intérêt, montre la quasi constance d’une atteinte rénale. Dans la plupart des cas, on trouve 2 reins doublés au moins de volume, soit décolorés (rose pâle) soit congestionnés (rouge violacé). Plus rarement deux organes réduits, comme desséchés et pâles. Les vaccinations contre la paramyxovirose par le vaccin inactivé en piqûres, ont été quelques fois suivies (1 % des cas au plus) d’accidents mortels. Et souvent sur des bons pigeons. Les trois quarts au moins des autopsies de ces victimes ont montré une néphrite nette et sans aucun doute. Si une telle issue est toujours fort désagréable, on a la preuve qu’une bonne partie des victimes avait sa carrière sportive derrière elle.
Comme nous l’avons évoqué plus haut, les reins sont après le foie, les principales victimes des intoxications. Le poison “brûle” le filtre rénal. Si la destruction est très importante à cause de la violence du poison, la filtration devient impossible parce que les tubes filtrants ont été anéantis. En plus de la violente congestion du rein qui s’ensuit, le sang non filtré se charge de plus en plus de déchets et l’organisme s’empoisonne peu à peu: chairs violacées, respiration profonde, bec entr’ouvert, fientes “en bouse” l’intestin étant seul à éliminer l’eau consommée en grande quantité habituellement (soif intense). C’est le tableau typique de l’intoxication par un excès de sel au colombier, ou la consommation de granulés d’engrais.
Comment protéger ces 2 organes essentiels autant que possible?
D’abord éviter les intoxications accidentelles. Le champ est devenu de nos jours un danger quasi permanent. Tous les amateurs affirment que leurs pigeons n’y vont pas… sauf quand il y a une hécatombe dans un champ de pois. Alors il faut apporter le champ au colombier: grit, verdure, argile salée (2 %), levures, etc… Ensuite il vaut mieux lâcher, au moins en période de semences ou de traitement, les naturels après le repas qu’à jeune. Dans la gestion de la colonie, il faut éviter les agressions continues que sont les excès de légumineuses, de petites graines, de médicaments non utiles.
Pour tonifier ces organes, pour faciliter l’élimination des déchets, l’usage hebdomadaire d’un bon thé sérieux, associant les cholagogues (favorisant la bile), les cholérétiques (excitant les autres fonctions du foie), des diurétiques (favorisant l’élimination par les reins) est hautement conseillé. Et avant les accouplements et en fin d’arrière saison (tardifs et mue) une cure prolongée de huit jours.

Dr. Vét. J.P. Stosskopf

Notices:

Toute atteinte hépatique profonde élimine automatiquement le bon pigeon sur le plan sportif. Le foie est le buffet des réserves du glycogène, combustible direct de l’effort musculaire. Si le foie n’a plus que des capacités réduites, l’effort possible sera également réduit.
Le travail musculaire intense augmente évidemment la quantité des déchets à éliminer.
Certaines maladies (trichomonose, vers capillaires, paratyphose) augmentent la production de bile: les fientes deviennent alors d’un vert intense, foncé, qui oriente le diagnostic. Le jeûne en l’absence d’appétit fait que la fiente n’est plus composée que de mucosités intestinales et de bile. Elle est alors rare, petite, vert-noir, collante.

[ Source: Article édité par Dr. J.P. Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]