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11 août 2020 Par admin

La “PEUREUSE” – pigeon voyageur


Avant propos:

Dans les années 1954 – 58 alors que l’Union anversoise vivait toujours des années de gloire, une petite femelle foncée à plume blanche se distinguait dans les étapes de grand fond. “La Peureuse” comme on l’appelait appartenait aux frères De Scheemaecker. Alors qu’elle avait sept ans, en ’58, elle était toujours engagée dans le fond. Elle se classa alors – toujours à l’Union – 31ème sur Périgueux (725 km) et 7ème sur Libourne (800 km), mais elle ne rentra pas de Perpignan (950 km) quelques semaines plus tard. Je ne puis oublier combien la perte de sa “Peureuse” attrista mon père ni les longs mois qu’il mit à espérer son retour. En vain … il en va ainsi dans le sport colombophile. En 1961 mon père publia une série de récits , très appréciés, au nom de sa préférée. Il y a quelques années il me révéla que le portrait de la “Peureuse” brossé en guise d’introduction à la série d’articles, était ce qu’il avait écrit de plus beau au sujet d’un pigeon. Nous reprenons la publication de cette série en mémoire de Noël De Scheemaecker. Ces beaux récits vous intéresseront j’en suis convaincu. J. De Scheemaecker

La Quot Peureuse Quot Pigeon Voyageur | Anecdotes Et Souvenirs Colombophiles

Monsieur Noël De Scheemaecker né le 23/12/1909 à Wilrijk, † décédé le 26/01/2002 à Schoten

C’est un grand honneur et un grand plaisir pour nous de rendre hommage à son exceptionnel engagement envers la colombophilie.


PORTRAIT DE LA “PEUREUSE”.

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Comment vous brosser le portrait de la “Peureuse”? Je le ferai à la manière du peintre, qui, installé devant son chevalet, tâche, à la Cézanne, de pénétrer dans son sujet, et de rendre la réalité avec tout ce qu’elle a d’apparent et de mystérieux. Les jeunes filles “peureuses” ont toujours eu ma sympathie, sans doute parce que la peur cache le mystère… et que le mystère m’a toujours attiré? En tout cas, je brosse son portrait “con amore”! D’aspect cette petite fille peureuse est frêle, élancée, nerveuse, vibrante, les pattes tendues, prête à s’envoler, lui donnant cet air de petite prétentieuse qui considère tout son monde d’un air distrait et hautain. Au fond cet air, peu sympathique pour beaucoup d’autres, est pour moi plutôt la marque d’une nature qui est toujours sur le “qui-vive”, et dénotant un système nerveux à fleur de peau. Ah ça… nerveuse elle l’est au plus haut point. Ses petits yeux -tous les yeux expressifs paraissent petits, parce qu’ils s’expriment dans une concentration qui converge vers la pupille – sont d’une richesse de couleur que nul peintre ne pourrait arracher de sa palette. Bref, ces petits yeux de la “Peureuse” c’est l’éclaboussure d’une santé physique débordante, c’est aussi l’étincelle d’une intelligence instinctive mobile à l’extrême. Elle n’est pas belle au sens que donnent les juges à ce mot dans les concours de beauté. Non, mais elle a une beauté “sportive”, une beauté qui relève plus de la vitalité que de la prestance purement corporelle. Et cette vitalité se reflète dans son plumage lisse, brillant et d’une intensité de tons dénotant un sang très riche. Par sa démarche nerveuse éthérée dans le colombier elle trahit ses capacités de vol. Elle effleure le plancher, plus qu’elle ne s’appuie sur lui – telle la voiture de course qui même arrêtée, semble s’élancer, tant son aérodynamisme dénote une pénétration facile de l’espace. Voilà la “Peureuse”, telle qu’elle m’est toujours apparue. Mais chers lecteurs, chaque fois que j’ai cueilli cette bien-aimée avec des mains amoureuses, elle m’a donné une sensation tellement exquise, que, de ma vie, je ne pourrai oublier ces moments adorables, pendant lesquels de son plumage soyeux elle me caressait la peau. Ah, qu’il est difficile, lorsqu’on veut être sincère envers son sujet. de brosser un bon portrait! Qu’il doit être difficile pour un peintre de mettre sur la toile ce qu’il voit. et qu’elles doivent être bien rares les fois que le peintre est conter: de ce qu’il peint. Et je comprends fort bien Cézanne qui déchirait ses toiles parce qu’il ne voulait pas montrer son impuissance à arracher de sa palette ce qu’il voyait dans la nature. Et si on devait estimer un Cézanne d’après ce que le peintre lui-même pensait à l’époque de son tableau, on n’en donnerait assurément pas les nombreux millions qu’on débourse maintenant pour une de ses oeuvres. Dans le portrait que je brosse de la “Peureuse” je suis un peu ce Cézanne, mais avec, comme pinceau, une plume en main. Et si je devais m’écouter, chers lecteurs, je déchirerais ce que j’écris de cette petite bête, dont je fus toujours amoureux. Lors-qu’on aime vraiment quelque chose, on ne souffre pas qu’on commette une faute envers cet objet de l’amour, en l’occurrence pour moi: la “Peureuse”… Sois indulgente, chère petite bête, si mes moyens me trahissent, sachez que tout mon coeur y est, mais que le reste c’est bien peu… Quand je t’avais en main, que tu étais petite! Comment as-tu échappé à la mort à l’âge du sevrage, toi petit moineau, trop insignifiant sans doute pour être tuée… et mangée! Ah, quand je songe à ce qui aurait pu arriver si tu n’avais été si peureuse! Car tu dois sans doute ta vie au fait que tu te mettais toujours hors de portée de mes mains. Pourtant tu es restée en vie, et t’es montrée la plus forte, la plus résistante entre des centaines de milliers de pigeons. Où puisais-tu cette forcé? Je sais que tu mangeais peu, que tu étais légère comme une plume, gonflée comme un ballon, et que tu n’abandonnais jamais la lutte. Tu devais, sans doute, “glisser” dans l’air tellement ton plumage était soyeux. Tes ailes, sans doute, ne se fatiguaient jamais, tellement elles étaient souples, et se balançaient à ton corps telles des rames de bateaux dans leurs dames de nage. Les extrémités de tes plumes de l’aile étaient plutôt plates, mais celles-ci étaient d’une souplesse extraordinaire. Je crois qu’on aurait pu y mettre un noeud sans qu’elles se cassent. Mais, à part la légèreté de ton poids, la finesse de ton plumage, ce qui me laissa l’impression la plus durable, était la “ligne” idéale. Ah! de la ligne, tu en avais à revendre, et bien de jeunes filles t’auraient regardé passer… si tu en avais été une! Ça commençait déjà avec ton bec. Que ton nez était mince – ce grand atout d’un pigeon qui doit voler sur de longues distances, tu l’avais à la perfection. Que ta petite bosse entre les yeux te donnait un air sympathique et intelligent. Que tes petits yeux pétillants mobiles, lumineux comme des étoiles, captaient et arrachaient le coeur de ceux que tu donnais le coup de foudre! Que je comprends maintenant que perdre un être cher c’est surtout perdre ses yeux! Mais quittons ta petite frimousse pour promener nos yeux le long de ton cou harmonieux, très mince surtout en dessous du bec, signe de grande santé, pour descendre aux épaules, qui étaient peut-être un peu larges par rapport à l’ensemble. Mais, pour moi, tu étais admirable ainsi, avec ton buste large fièrement porté vers l’avant. Cela aussi te donnait de la personnalité. Cela ne faisait pas lourd tellement tu avais la démarche nerveuse et légère. Ton dos était bien droit, très effilé vers l’arrière; jamais, je n’ai pu sentir où commençait ta queue. Et ça c’est très rare chez les animaux de ton espèce. Excusez-moi, ma petite chérie, mais je ne dirai rien de ton ventre pour le bon motif que… tu n’en a jamais eu! Et c’est bien pour cela que tu étais si légère, car je crois que le poids, c’est le pigeon lui-même qui le fait en s’empiffrant, et qu’en fin de compte, s’il donne l’impression de peser, c’est à son ventre qu’il faut l’imputer, à toute la graisse qui s’y accumule. Pauvres bêtes! Lorsque le peintre achève un portrait il souffre, car il tâche de donner par quelques petites touches, ci et là, un peu plus de ressemblance encore, un peu plus de vie surtout à son tableau. Il se concentre avec frénésie pour survaincre son impuissance, et le paroxisme, hélas, aussi l’insuffisance de cet effort se traduisent finalement par deux petits points de lumière blanche qu’il pose délicatement dans les yeux du sujet qu’il a brossé avec tant d’amour sur la toile. Et il regarde une dernière fois son tableau, un peu honteux et mortifié de n’avoir pu réaliser la perfection… C’est le drame de l’artiste, c’est aussi tout son mérite et toute sa grandeur. Et quand je regarde le pauvre portrait de ma chère “Peureuse”, j’ai honte aussi, et j’ai mal, car je sens maintenant si fort qu’il est propre à l’amour de n’être jamais pleinement satisfait – mais c’est ainsi qu’il peut durer et être éternel!

La Peureuse ( à suivre )

[ Source: Article édité par M. Noël De Scheemaecker – Revue PIGEON RIT ] 

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