18 novembre 2022 Par admin

Les travaux sur l’orientation des pigeons voyageurs – Wolfgang Wiltschko

Les travaux sur l’orientation des pigeons voyageurs de Roswitha et Wolfgang Wiltschko de l’Université J.W. Goethe de Francfort en Allemagne sont mondialement connus. De 1978 à 1985, ces chercheurs ont montré l’influence des champs magnétiques sur l’orientation des pigeons. En effet, des expériences ont démontré que de très jeunes pigeons étaient désorientés lorsqu’ils étaient déplacés dans des champs magnétiques statiques perturbés et dont l’intensité était comparable au champ magnétique terrestre. Il est important de souligner que cette désorientation se produit uniquement quand les jeunes pigeons sont soumis a l’action du champ magnétique pendant leur trajet jusqu’au lieu du lâcher et non pas quand les pigeons sont “traités” après leur arrivée sur le lieu du lâcher.
Comme chacun l’a compris, ces chercheurs en ont conclu bien évidemment, dans le premier cas, que les pigeons avaient été empêchés de capter des “informations magnétiques” pendant leur transport, ceci expliquant leur manque d’orientation. Mais ce qui est encore plus intéressant pour nous colombophiles, c’est que cet effet “déroutant” du champ magné-tique perturbé appliqué pendant le transport est limité dans la vie du pigeonneau et correspond à une courte période du développement du système d’orientation. Cette influence néfaste tend à disparaître lorsque les pigeons deviennent plus âgés et font l’acquisition d’une “carte de navigation”.

La théorie de Luschi P.
Ces dernières années d’autres chercheurs ont accordé beaucoup moins d’importance à la théorie magnétique.
En 1996, P. Luschi, C. del Seppia, E. Croisio et F. Papi ont publié un article scientifique contre la théorie chère aux Wiltschko, mettant en doute la prise par les pigeons d’informations magnétiques pendant le trajet jusqu’aux lieux de lâcher. Ces chercheurs ont également observé que les pigeons étaient désorientés par un transport sous un champ magnétique oscillant irrégulier ou dans l’obscurité totale. Mais là où leur avis est divergeant par rapport aux Wiltschko, c’est qu’un traitement préalable des pigeons avec de la promazine (tranquillisant) leur permettait de s’orienter correctement malgré l’application des champs magnétiques. Ces chercheurs ont donc conclu que la désorientation des pigeons n’était pas directement due aux effets du champ magnétique mais au stress provoqué par ce champ magnétique.

La réaction des Wiltschko.
Cruel dilemme car nous voilà de retour à la case départ. C’était sans compter sur l’opiniâtreté des Wiltschko qui entreprirent de nouvelles expériences et effectuèrent des lâchers de pigeons transportés sous éclairage artificiel de différentes longueurs d’ondes. Les résultats de ces expériences montrèrent que les jeunes pigeons sont seulement désorientés pour une certaine longueur d’onde. Or quelle ne fut pas la surprise des Wiltschko de constater que cette longueur d’onde était la même que celle qui empêche les oiseaux migrateurs d’utiliser leur compas magnétique.
Un autre point important souligné par les Wiltschko à propos de l’expérience de P. Luschi et collaborateurs réside dans la nature du champ magnétique. En effet, un champ magnétique oscillant irrégulier est fondamentalement différent d’un champ statique, comme celui appliqué par les Wiltschko. C’est d’ailleurs l’Italien Papi qui a démontré que les pigeons italiens jeunes ou vieux plus expérimentés, traités par des champs oscillants, soit pendant le transport, soit sur le lieu du lâcher, présentaient une forte perturbation de leur sens d’orientation, montrant ainsi que les effets produits par des champs magnétiques oscillants sont d’une nature différente des effets produits par des champs statiques. Mais il y a beaucoup plus étonnant! Quand des pigeons allemands furent traités par les mêmes champs magnétiques oscillants, soit par l’équipe de Wallraff, soit par les Wiltschko eux-mêmes, les effets sur l’orientation des pigeons allemands étaient nuls. Cela ne fut pas sans inquiéter les Italiens qui firent l’acquisition de petits pigeonneaux allemands, les ramenèrent en Italie et les élevèrent a côté de leurs petits compagnons d’expérience nés en Italie. De nouveau, les pigeons d’origine allemande ne furent pas perturbés par les champs oscillants alors que leurs congénères italiens l’étaient.
Les chercheurs italiens ne purent interpréter ce comportement que par des différences génétiques: les pigeons italiens semblaient être plus facilement stressés que les pigeons allemands.
Il faut signaler également que lorsque le transport se fait dans l’obscurité la plus totale, les très jeunes pigeons sont désorientés. Les Wiltschko pensent que cela s’explique par une désorganisation du processus de réception magnétique dépendant de la lumière. Ces effets négatifs sur l’orientation de jeunes pigeons des champs magnétiques statiques perturbés ou de l’obscurité totale appliqués pendant le transport vers le lieu de lâcher cessent dès que les pigeons deviennent plus âgés et expérimentés.

Conclusion.
Selon les Wiltschko:
– le stress est une particularité des pigeons italiens utilisés
– les effets des champs magnétiques oscillants ne sont pas comparables aux effets des champs magnétiques statiques
– ce phénomène de désorientation est transitoire et se produit uniquement chez de très jeunes pigeons inexpérimentés Donc pour les Wiltschko les effets mesurés par Luschi et ses collaborateurs ne sont pas en contradiction avec les résultats de leurs expériences, à savoir l’utilisation par de très jeunes pigeons d’informations “magnétiques” captées pendant le transport vers le lieu de lâcher.
A nous colombophiles, d’être prudents lorsque nous effectuons les premiers entraînements de nos pigeonneaux précoces et cela d’autant plus s’ils ont été mis dans l’obscurité pour retarder la mue. Cela a peut-être décalé leur horloge interne, les privant de l’aide d’un mécanisme d’orientation comme le compas solaire. Il est bien possible qu’ils se présentent au lieu du lâcher comme les jeunes pigeons inexpérimentés des Wiltschko. Aussi pensons à limiter le stress et évitons de les déplacer dans l’obscurité la plus totale, comme dans le coffre de la voiture.

Ing. J.P. Duchatel

Notice:

Nous devons être prudents lorsque nous effectuons les premiers entraînements de nos pigeonneaux et cela d’autant plus s’ils ont été mis dans l’obscurité pour retarder la mue. Aussi pensons à limiter le stress et évitons de les déplacer dans l’obscurité la plus totale, comme dans le coffre de la voiture.

[ Source: Article édité par Ing. J.P. Duchatel – Revue PIGEON RIT ]